Le numéro 30 de la Lettre d’information "Recherche sur le vieillissement" vient de paraître. Il porte sur les relations entre frères et sœurs au cours du vieillissement, thème généralement étudié sous l’angle de l’aide apportée aux parents ou de la transmission de patrimoine. Les contributions de ce numéro tâchent de montrer la richesse de ce champ d’étude, qui gagnerait à être analysé sous l'angle des dynamiques entre frères et sœurs et du rôle qu'elles peuvent jouer en tant que groupe social.
Dynamiques des liens fraternels à l’heure du vieillissement
Les relations entre frères et sœurs « sont les liens de parenté les plus durables dans la vie d’un individu », souligne le sociologue Jean-Hugues Déchaux, mais elles évoluent et se reconfigurent sans cesse au cours de l’existence. La recherche s’intéresse d’une part à l’évolution des liens entre frères et sœurs lorsque ceux-ci vieillissent, d’autre part lorsque la fratrie est confrontée au vieillissement des parents et/ou à leur prise en charge.
L’Association Rhône-Alpes de gérontologie psychanalytique (ARAGP) a consacré une journée d’étude à cette thématique, dont on trouve le compte-rendu dans cette Lettre. « Passer de la fratrie à la fraternité suppose de fraterniser, rappelant que ce lien est toujours à construire et à soutenir », expliquent les auteurs Jean-Marc Talpin et Céline Racin, psychologues cliniciens. La fratrie reste une ressource, mais aussi un terrain de tensions complexes à appréhender. Vieillir ensemble ou se retrouver tardivement soulève des enjeux affectifs et pratiques.
Place des solidarités dans les fratries
Selon Roméo Fontaine, « les logiques d’implication [sont] différentes selon le rang des enfants dans la fratrie ». Plusieurs articles de cette Lettre montrent en effet que les aînés sont généralement les plus mobilisés face à la perte d’autonomie d’un parent âgé. Dans les grandes fratries, les rôles d’aîné et les affinités d’âge marquent durablement les relations. Ces liens influencent l’entraide et l’organisation familiale au fil du temps. Il semble en outre que les sœurs s’impliquent souvent plus dans l’aide apportée aux parents vieillissants.
Lorsque l’un des membres de la fratrie est atteint d’un handicap mental, les frères et sœurs deviennent souvent tuteurs et aidants de la personne quand les parents disparaissent. Ce relais mêle responsabilités juridiques, soutien affectif et coordination avec les institutions (article de Sarah Yvon, doctorante en sociologie).
Enjeux juridiques liés à la notion de fratrie
La fratrie n’a pas de statut juridique mais des enjeux juridiques lui sont attachés, comme les successions ou la prise en charge d’un parent ou d’un membre de la fratrie vulnérable. Une médiatrice familiale, un notaire et une juriste spécialiste du droit des personnes et de la famille ont accordé un entretien à Camille Bourdaire-Mignot et Tatiana Gründler, maîtresses de conférences en droit privé et en droit public, respectivement. Que l’on considère le vieillissement des parents ou celui de la fratrie, les difficultés peuvent se révéler lourdes. Il existe des outils légaux pour mieux anticiper les problématiques en partie liées au vieillissement.
Lire La Lettre d’information n° 30 – Frères et sœurs dans le vieillissement.
Pour aller plus loin
- L’article « Vieillir dans les montagnes suisses : sociabilités et appartenances locales des vieilles femmes ‘du coin’ » de Retraite et société (Pauline Mesnard et al., 2024) étudie, entre autres sociabilités des femmes très âgées, les relations fraternelles.
- « La ‘lutte des places’. Exemples de fratries burkinabè en milieu rural » dans la revue Gérontologie et société (Tom Briaud, 2019) traite, à partir d’exemples ethnographiques issus du milieu rural burkinabè (région Centre-Est), de fratries masculines dans leurs relations intragénérationnelles (collatéraux) et intergénérationnelles (descendants/ascendants) à différents moments du parcours de vie.

